□ you are waiting for a train.

Les deux mains posées sur le rebord de la fenêtre, tu peux sentir la morsure du froid en ce début d’hiver bientôt proche. Un vent de fraicheur qui aurait pu être appréciable, dont tu aurais pu profiter pour calmer le rouge qui réchauffe tes joues, pour apaiser la rage tant la colère et la déception qui résonne dans ton esprit. Les deux mains posées sur le rebord de la fenêtre, tu ne cesses de penser et encore penser. Des pensées qui se dispersent comme un tourbillon à l’image dont tu te perds souvent, bien trop souvent. Comment avais-tu pu être si étourdie, maladroite et tout simplement oublier. Une erreur, qui risquait de tout changer, qui t’effrayait. La porte de l’entrée de l’appartement se referme en un bruit sourd tandis que le plancher en bois grince sous ses pas. Vêtue de ta veste en laine bleu encre de chine, tu continues d’observer la ruelle où les voitures commencent à former une file, sonnant le début des bouchons de fin de semaine. Un véritable calvaire qui avait tendance à mettre la patience de ton frère à rude épreuve et qui avait pour habitude de te faire rire. Une pensée qui adoucit quelque peu ton anxiété mais qui revient très vite au galop lorsque les mains de Jay entourent ta taille, son menton se posant doucement sur le sommet de ta tête. Les effluves de son parfum enivrent tes narines, tu fermes les yeux appréciant la sécurité de son étreinte. Une étreinte à laquelle tu devais mettre un terme malgré toi, malgré lui. « On doit arrêter de se voir, on peut pas continuer comme ça. ». Lui dis-tu tout en te dégageant de ses bras. Ton regard a alors le malheur de rencontrer le sien, des iris oscillant entre réprobation et incompréhension. Il te toise avec une intensité maligne et perspicace tentant de comprendre ce qui peut lui échapper, ce qui peut bien motiver ta motivation. Pourquoi ? Comment ? Où demeurait la faute ? A qui incombait-elle ? Les deux demeuraient responsables autant l’un que l’autre, mais tu ne pouvais imposer ce fardeau, cette conséquence à Jay. Bien qu’issu d’une famille de bonne famille, influente et active dans le domaine de la pharmaceutique, Jay avait su garder les pieds sur terre, faisant bien souvent front à ses parents. Etre magnanime et diplomate, il n’était guère sujet à émettre la moindre colère en dépit si cela pouvait le froisser, le mettant alors hors de lui. Une controverse que tu étais sans doute l’une des seules à avoir découvert. Une rencontre hasardeuse, un ami de ton frère qui avait tout simplement être attiré par ta personne et encore aujourd’hui tu ne cesses de t’interroger. Ce que tu pouvais douter de toi-même Jamie ! Pour autant, la réalité était bien présente et tu ne pouvais le lui imposer. Il méritait bien que cela. « Qu’est-ce qui se passe Jamie ? Il y a quelque chose que tu ne me dis pas. Bon sang ! Parle-moi ! ». Sa colère est palpable, imminente mais il se contient tu peux le lire sur les traits de son visage. Il a appris à lire en toi aussi bien que ton frère ainé – peut-être pas aussi bien que lui – mais il pouvait y déchiffrer l’essentiel.  Il s’approche de toi d’un pas calme et franc lorsque tu lèves les mains pour lui intimer de ne pas faire un pas de plus. « Arrête, c’est terminé c’est tout. Toi et moi on est différent, ça ne pouvait pas marcher … ». Répliques-tu dans une intonation calme et assurée. Un ton qui ne te ressemble pas réellement qui à ton grand étonnement parait pleinement convainquant. Son regard s’accroche au tien, en silence comme s’il désirait se convaincre que tu ne jouais pas la comédie. Il doutait, tout comme toi en permanence. « Ne t’attends pas à ce que j’accepte ta décision comme ça Jamison. Dis-moi ce qui se passe … ». Son assertion était une certitude. Tu détestais que l’on use de ton prénom dans son intégralité, cela te rappelait de mauvais écho. Tu le couves d’une œillade dure, obtus. « Rien qui ne te concerne désormais. ». Tonnes-tu avant de prendre ton sac et de quitter l’appartement.

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Dans la cabine d’ascenseur, le temps semble avoir suspendu son vol. Appuyé contre la paroi, tu respires avec difficulté, luttant contre les larmes qui s’écoulent le long de tes joues. Tu les chasses d’un revers de main, te décidant enfin  à appuyer sur l’étage où vit ton frère. Howard est le premier nom, la première personne à te venir à l’esprit, après tout tu t’es toujours tourné vers lui en cas de problèmes, quand bien même tu imagines le lourd fardeau que tu représentes pour lui. Passant une main dans tes cheveux comme pour te donner une certaine contenance, tu soupires à nouveau pour te libérer de l’angoisse qui monte crescendo. La sonnerie de l’ascenseur retentit, t’indiquant que tu es enfin arrivé et c’est tel un automate que tu marches jusqu’à la porte du logement de ton lien fraternel. Ta conscience bouillonne sous l’assaut d’un millier d’interrogation, mais elles mènent toutes à la même conclusion : que ton existence se résume à succession d’échecs. Trouvant le jeu de clés qu’il t’avait confié, tu ouvres la porte que tu prends soin de refermer. Les lumières sont allumées, une mélodie de musique jazz retentit en fond sonore, accompagné du bruit des touches d’un clavier d’ordinateur. Tu peux voir ton frère tendre légèrement le cou, t’observant en silence les lèvres scellées. Il se lève sans attendre pour venir te prendre dans ses bras. Les traits d’expressions de ton visage dépeignent un visage fatigué et tes yeux rougis par les larmes salées lui traduisent sans le moindre mot une vérité qu’il ne possède qu’à demi-mot. Ses bras protecteurs t’entourent comme autrefois, te remémorant les nombreuses fois où il te veillait la nuit pour chasser les ombres de tes cauchemars d’enfants. L’éclat de ses yeux est silencieux, patient mais teinté d’un marbre soucieux. Il caresse tes boucles noires, un héritage venant tout droit des racines familiales de votre figure maternelle. Un geste destiné à te calmer, te faire comprendre qu’il était présent et qu’il serait toujours là pour toi. Tu finis par reculer légèrement, essayant de ne pas croiser son regard. Tu te sentais tellement redevable envers lui. « Qu’est-ce se passe ? ». T’interroge-t-il calmement. Sa patience trahit comme toujours son inquiétude à son sujet. Décidément, tu ne faisais pas mieux que lui apporter un lot de souci. Quel immature tu étais ! Tu croises les bras contre ta poitrine en guise de position défensive, fermant les yeux en te dirigeant vers la cuisine. Marcher un peu, pour gagner des secondes. Howard te suit jusque dans la cuisine, perdant quelque peu patience. Sous l’authenticité de son regard, tu laisses la vérité pure et simple t’échapper. « Je suis enceinte. ». Souffles-tu l’œil vide et brillant à la fois. Désemparé, désespéré, tout bonnement perdue. Howard semble accuser le coup avant de venir te reprendre dans ses bras et tu finis par craquer relâchant une lourde pression. Seulement la part résonne encore dans ta tête.